Vous avez pu entendre leur chanson « Amour Furieux » lors de la playlist de la cave #6. Johann vous propose ici une interview du groupe Dors Centaure.

Le flot habituel des morceaux qu’on me conseille m’apporte parfois une certaine lassitude. Je compile des chansons “sympas” et les laisse gentiment couler sur mes oreilles. Mais il arrive que des sonorités me heurtent d’un coup, me sortant de ma torpeur musicale pour me procurer une certaine excitation. Ce fut le cas des deux chansons du duo Dors Centaure : “Amour furieux” et “Empereur”. Cette pop mélodieuse, incroyablement addictive, est servie par une voix féminine qui nous rappelle tout ce que les années 80 pouvaient offrir d’enthousiasmant. Pour notre plus grand plaisir, et le vôtre, j’ai pu interviewer ledit duo.

Bonjour Dors Centaure ! Pouvez-vous vous présenter ?

Dors Centaure : Bonjour ! D’abord merci pour l’intérêt que tu portes à notre projet ! On est un duo pop psyché, influencé principalement par des images surréalistes, des films de la Nouvelle Vague, et le mouvement dans nos vies personnelles. Notre projet a pour but de nous plonger dans notre intérieur pour y résoudre des énigmes dont nous n’avons pas encore les réponses.

J’ai cru comprendre, d’après la description que vous proposez sur les réseaux sociaux, que votre nom a rapport avec une certaine vision du réel, une certaine façon de voir le tumulte du monde en face. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Dors Centaure : Oui, dans nos textes et nos visuels, nous faisons allusion à des mécanismes inconscients, on met en scène des instances de notre inconscient, comme le « ça », le « sur-moi » etc. Nous avons imaginé que parmi ces instances, il existait Centaure. Il s’agit d’un gardien qui protège un espace dans lequel nous nous réfugions lorsque nous voulons fuir le réel, cet endroit, c’est le vide blanc. 

A l’écoute des paroles, on sent que toute cette poésie recouvre une vision plutôt désabusée des rapports femmes/hommes. Mais on sent aussi comme un empowerment féminin qui libère et fait du bien. Dors Centaure naîtrait-il ainsi d’une nécessité de proposer autre chose ? Nécessité personnelle et/ou collective ?

Dors Centaure : Peu de personnes comprennent, aux premières écoutes, ce message. Je suis contente que ça ne t’aie pas laissé indifférent ! En effet, en ce moment, depuis quelques années, je fais l’effort de dé-construire certains sophismes qui ont conditionné mon développement psychologique et mon rapport aux hommes, entre autres. Dans « Amour Furieux » je parle surtout de ma mère, de la façon dont elle a quitté son pays (le Mexique) par amour pour un homme, à qui elle aura tout donné, gravi des montagnes d’obstacles qui paraissent insurmontables, et dont elle ne tirera jamais aucune reconnaissance. Ce sont des schémas qui se répètent, et que j’essaye de comprendre.

Comment se passe le processus de composition en termes de répartition des rôles (paroles / instru) ?

Dors Centaure : En général on compose ensemble, Alex à la guitare, moi au clavier, puis on ajoute les paroles et la mélodie à mesure que la composition instrumentale avance. En fait on fait un peu tout en même temps, nous ne sommes pas des personnes très organisées, plutôt portées par le lyrisme d’un moment. Haha !

Quelles ont été vos anciennes expériences de musicien.ne.s ? Comment cet intérêt pour la musique vous est-il venu ?

Paloma : pour ma part, la musique m’est venue avec ma mère, qui me chantait des chansons de Bob Dylan le soir avant de me coucher. Je me souviens aussi des fêtes de famille où tout le monde chantait des chansons mexicaines, on sortait les guitares, la tequila, et c’était la fête. Par la suite, très influencée par la musique folk des années 70, j’ai monté mon premier groupe, Ladybug and the Wolf. Puis j’ai rencontré Alex, et on a commencé à jouer ensemble.

Alexis : J’ai commencé la guitare vers 13 ans tout simplement parce que j’étais fan de métal et qu’avec un pote on voulait monter notre groupe, c’est donc ce qu’on a fait ! Plus tard, je me suis intéressé à la pop, à l’électro et j’ai monté le groupe Doorsfall avec mes deux meilleurs potes, une aventure qui aura durée presque 10 ans. Pendant ces 10 ans, j’ai multiplié les groupes dans des styles différents tout simplement pour m’épanouir musicalement, j’ai joué notamment dans Keirda 2.0 (math-core), F Stands For Fuck You (Grindcore), Benighted (brutal death metal), Eska (rap), Nossu (hip-hop electro). Aujourd’hui je suis bassiste pour HJELVIK qui est un groupe de black métal basé en Norvège.

Quels ont été les artistes qui vous ont le plus influencé.e.s (musique mais aussi littérature ou autres arts) ?

Paloma : Sans aucune hésitation, la première fut Frida Kahlo. Je l’admire depuis que je suis enfant, ma mère m’a très rapidement montré ses œuvres, j’ai visité sa maison à Coyoacan, et admire souvent les fresques de Diego Rivera dans le Palais Nacional de Mexico, quand je rends visite à ma famille. Il y a aussi Boris Vian, Bob Dylan, les Beatles évidemment, et plus récemment des groupes comme Temples et Pond.

Alexis : Je suis influencé par tout ce que j’écoute et j’écoute beaucoup de choses très différentes, si il faut vraiment donner une short list, je dirais Tame Impala pour la pop, Shame pour le rock, Converge pour le métal et Gesaffelstein pour l’electro, je suis désolé pour tous les autres…

Ce serait vraiment chouette de vous retrouver sur scène et de chanter vos chansons avec vous, à tue-tête. Avez-vous déjà joué en concert ? Est-ce prévu ?

Dors Centaure : Nous avons joué en première partie de Jeanne Added à Valence il y a plus d’un an, puis il y a eu tu sais quoi, « le virus dont on ne doit pas prononcer le nom ». Nous devrions jouer au Fil le 26 février prochain, le concert sera rediffusé en streaming, tu pourras même chanter à tue tête sous ta douche.

En attendant que les conditions sanitaires nous permettent cela, des sorties sont-elles prévues ? Un album peut-être ?

Dors Centaure : Tu verras tu verras. D’abord un single dans pas très longtemps !

J’aimerais aussi évoquer vos clips que je trouve admirables. Celui de la chanson “Empereur” nous montre Paloma danser le long d’un chemin éclairé frontalement en pleine nuit. Celui d’”Amour furieux”, tourné pendant le premier confinement, porte notre regard entre quatre murs. On y ressent toute une énergie contenue, toute cette énergie que l’on ne pouvait répandre sur le monde extérieur, là, débordante. Et encore une fois, c’est à travers la danse que votre musique se déploie visuellement. Comment vous viennent ces chorégraphies ? Paloma a-t-elle une formation de danseuse ?

Dors Centaure : Hahaha ! Merci du compliment, mais non. Tout cela n’est qu’une improvisation, continuum de la façon dont je mène ma vie. C’est à dire en faisant un peu n’importe quoi, mais avec le cœur, et parfois ça tombe juste. J’ai toujours exprimé à travers le corps ce que j’ai du mal à dire. Nos clips sont également faits sur un coup de tête. Pour « Empereur » on a décidé de l’histoire du clip environ une heure avant de le tourner, c’était en rentrant de soirée, dans la nuit. Pour « Amour Furieux », on s’ennuyait durant le confinement, et les images venaient au fur et à mesure qu’on tournait. On a juste laissé notre instinct, et notre inconscient quelque part, nous guider.

En attendant toutes vos prochaines sorties, pourriez-vous nous conseiller des albums, des livres ou d’autres œuvres culturelles pour nous faire patienter ?

Paloma : Avec plaisir ! J’ai découvert l’écrivaine Sophia de Seguin avec « La séparation », c’est un journal, c’est assez bouleversant. Aussi, jai beaucoup aimé me plonger dans les romans de Romain Gary dernièrement. En peinture je suis très absorbée par Inès Longévial, qui expose d’ailleurs près de Paris en ce moment. Elle a réalisé un projet avec le danseur Léo Walk, autre artiste qui attire beaucoup mon attention en ce moment. C’est comme si dans son corps il arrivait à figer le mouvement d’une passion qui l’anime. 

Pour finir, que vous évoque le terme de “Cultures Sauvages“ ?

Paloma : Quelque chose de subversif, d’indiscipliné, l’expression d’une culture indomptable qui s’émancipe.  

Merci Dors Centaure pour cette interview. Je vous souhaite le meilleur pour cette aventure musicale qui s’offre à vous. Chez Cultures Sauvages, nous continuerons à vous écouter avec joie.

Dors Centaure : Merci à toi petit sauvageon cultivé !

“Empereur” et “Amour furieux” de Dors Centaure, deux souffles qui subliment les épines du monde en mantras pop entêtants et qui vous porteront avec joie. Je vous partage ici les deux clips ainsi que l’Instagram et le Facebook de Dors Centaure.

Facebook de Dors Centaure

Instagram de Dors Centaure

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