Dandy littéraire, chantre de la nonchalance et de l’éclat stylistique, il semble que la descendance de Jean-Jacques Schuhl puisse se trouver en musique. Ce dernier possédait cet art aristocratique du dédain et de la distance, tel qu’on le retrouve dans ce dialogue :

– Ce n’est pas ton genre, tout ça.

– J’essaie de ne pas avoir de genre, même pas le masculin et surtout pas le singulier.

Jean-Jacques Schuhl, Telex n°1

Ainsi, on retrouve dans toute une scène musicale actuelle une étonnante singularité, marquée par le refus des codes et des classements, et cherchant à s’inscrire dans les marges sans pour autant s’enfermer dans une volonté de rester underground. C’est cette singularité que l’on retrouve dans le premier EP de Romance intitulé Paris-Prague. Composé de Charles Crocq (chant/guitare), de Lise Lechopier (basse/choeurs) et de Pierrick Orfao (guitare) , Romance propose avec ces quatre titres mâtinés de rock dandy et de punk romantique une traversée rouge poussière pour réenchanter notre été. Si le groupe s’inscrit dans une noble famille qui comprendrait aussi bien des marquis sadiens, des garçons accompagnés de Marie que des jeunes gens modernes, il sait s’en affranchir et offre des chansons romantiques et décalées qui parlent aussi bien au cœur qu’au corps.

Avec cet EP, Romance compose la bande originale des amours perdus et retrouvés, celle d’une jeunesse actuelle rêveuse et lucide, rock et réaliste, mélancolique et sauvage.

Dès le morceau d’ouverture, Cache-Cache, l’air mordant et nonchalant de la voix de Charles apporte une morgue et un dédain qui contribue à créer toute une ambiance romantique emprunte de rage rentrée. La guitare vient apporter une brutalité qui lacère et emporte la mélodie, nous donnant envie d’aller terminer la nuit dans un dancing vaporeux teinté de nuit et de poésie.

Dans Plus comme avant, la guitare à l’allure incisive confère à nos regrets un nouvel élan romantique. La mélodie et les emportées lyriques du refrain avec l’apport des chœurs convoquent un sens fort du romanesque. La romance est donc à comprendre comme une traversée de nos sentiments troublés et souvent vaincus.

Avec le titre suivant, Gare à toi, Romance convoque cette morgue et cette désinvolture que l’on retrouve dans les influences du groupe. Le morceau assume cette pose rock et dandy pour mieux rester aristocratique dans ses larmes sentimentales.

Avec le morceau final J’irai à Prague, le groupe nous rappelle à quel point les voyages sont sources de poésie, de déception et d’horizons musicaux.

Cet EP semble ainsi fonctionner comme le journal mélodique et rythmé de personnages authentiques et désinvoltes, cyniques et sincères. Romance compose une musique oxymorique faite d’allers amers et de retours conquérants, de voix mordantes et de guitares racées, de basses cadencées et de chœurs romantiques. De quoi faire de nos nuits musicales le meilleur voyage à faire durant l’été qui s’annonce plein de Romance.

Antoine

S’il fallait résumer ma vie, je dirais que je suis un mélange entre Laure Adler, Droopy et Edouard Baer.

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