Whatever happens, happens…
Je profite de cette belle occasion qui m’est donnée par Cultures Sauvages, publier tous les mardis du mois de mai 2022 dans la section “un artiste, un univers”, pour développer une pensée sur les rapports qu’entretiennent l’écriture et le geste. Même si elle part d’une volonté d’auto-réflexivité, cette pensée sera poétique dans sa forme. (Les quatre premiers volets sont à lire ici, là ; ici et là).
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Un des principes de la performance, c’est d’accepter ce qui arrive. faire en sorte de penser que ce qui se passe, se passe. Que c’est ça le réel, et pas ce qu’on avait prévu.
le réel ce n’est pas ce que j’avais imaginé.
le “spectacle” n’est pas ce que j’avais conceptualisé dans mon cerveau, prévu à l’avance,
le spectacle, c’est ce qu’il se passe sur la scène. Point barre.
c’est le geste que je fais et que les autres voient. celui-là même. c’est moi. c’est nous.
c’est notre réel. si je me trompe de vers, si une feuille tombe, c’est ce qui devait se passer. ne dit-on pas “c’était écrit” ?
il y a quelque chose de l’ordre du présent pur, dans la performance. du moment.
Par exemple, dans la performance « Botte de oinf’ », je n’avais rien prévu, sauf le fait qu’il y aurait du foin sur scène. une matière : vois ce que tu peux faire avec.
parfois je me demande ce qui me conduit à faire tout cela autour du texte. une petite voix : je pourrais très bien faire une simple lecture. oh comme ce serait infiniment plus reposant…!
peut-être alors, est-ce une quête de ce présent pur. Impossible à atteindre dans la vie, ni même dans l’écriture (dans la mienne du moins…!), dans le temps de l’écriture, qui n’est pas celui du présent chez moi. Plutôt celui d’un temps immémorial où d’un temps inventé, qui devient espace : un espace-temps imaginé, quasi cérébral, fantasmé…
Je teste quand même plusieurs endroits de la « lecture-performance » : la lecture simple pour une caméra, (une lecture de ce même texte à la bougie avec montage vidéo à partir d’une performance est en cours de réalisation, à venir sur la chaîne ! N’hésitez pas à vous abonner) la lecture d’un texte d’une autre autrice, la lecture sur de l’électro… :
Dans tous les cas, je fais tout ça pour INVESTIR la poésie. Investir = Aller dedans. M’en faire mon habit. Ne pas la laisser au stade/à la strate d’émotion solitaire. Poésie investie = poésie qu’on habite (et pas vraiment qu’on actionne, ou qui veut faire action dans le monde, ou être l’objet d’un dispositif, comme la poésie-action) Laissez-moi vous partager un drôle de schéma, qui n’est pas propre et c’est fait exprès, je vous laisse entrer dans les coulisses de mes recherches artistiques personnelles !
Ici, c’est embryonnaire. Qu’est-ce qui vient en premier, le poème écrit ou le poème-geste ? Quoi de la vie intérieure ressort dans le poème ? sur scène ? Qu’est-ce que le réel ? Qu’apporte le geste aux mots ? Etc. Je ne souhaite pas conclure, ni trop expliquer.
Merci de m’avoir lue ces cinq semaines ! Et pour acheter mon livre, c’est par ici !
Addendum
La poésie,
elle est partage de beautés.
partage de choses qui mueve el piso, comme dit mon amie poétesse Ada Mondès !
Une confidence. si je pouvais, je ne vivrais que comme ça : voir et écouter les choses. se désengager puis se réengager à souhait. participer à la beauté des autres et les faire entrer un peu dans la mienne. comme ça, doucement, en vase communiquant. c’est impossible, le monde moderne et productif ne veut pas. peut-être que j’écris pour compenser, pour palier cette… frustration !
Peut-être que le geste naît de la frustration. je ne peux pas partager tout ce que je souhaite avec autrui, alors,
heureusement il y a
un espace où tout est possible, un espace magique et sain,
vide et rempli,
le plateau,
où je peux déverser ce que je souhaite lui/vous donner.
Pour aller plus loin, découvrez la biographie de Hortense Raynal :
Hortense Raynal est performeuse, poétesse, comédienne et aveyronnaise. Elle publie son premier livre de poésie, Ruralités, en 2021. Elle a étudié la littérature, le théâtre et le cinéma à l’ENS Ulm de Paris. Elle se forme au théâtre physique, aux accointances avec la danse, en Feldenkreis, Body Mind Centering, Butô et clown. Elle réalise des performances partout en France, et diffuse sa poésie sur Spotify & YouTube.
Sa poésie est organique, gestuelle. Elle explore autant dans son écriture le champ de la géopoésie et les thèmes de la mémoire paysanne que la posture punk et queer. Et ce, toujours avec un lien très physique aux syntagmes. Elle explore dans ses recherches performatives la saturation de la langue, sa matière physique, la générosité scénique, le lien public-poésie-poétesse, le lien geste et écriture, la présence de l’objet livre. Comment investir la poésie ?
Elle a publié dans de nombreuses revues : Teste, Point de Chute, Lichen, Fragile, Tract, Gustave, Terre à ciel, Meteor, Sabir… Elle a été poétesse résidente à La Factorie, à L’Usine Utopik, à La Maison de la Poésie d’Amay, à La Colle à Gréoux-les-Bains entre 2020 et 2022. En 2022, elle fonde Mater Atelier, qui tente de fédérer le matrimoine poétique contemporain.
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