Découvrez l’écrivain et traducteur Sébastien Cagnoli à travers une série de textes dans lesquels il nous fait plonger dans son univers.

Voici le troisième volet.

Si j’ai toujours eu plus de satisfaction à traduire de la poésie classique plutôt que des vers libres ou de la prose, c’est sans doute parce que je m’oblige alors à respecter des contraintes formelles – tout en me réservant le droit d’y déroger quand ça m’arrange, comme un gros paresseux que je suis. Ma première expérience marquante de traduction littéraire, c’était vers l’âge de treize ans : on avait commencé à déchiffrer une ode anacréontique en cours de grec, et on était censé finir la traduction à la maison. « Et tant que vous y êtes, faites-le en vers ! » avait lancé la prof en rigolant. Je me rappelle l’avoir prise au mot. Et j’y avais pris un plaisir fou.

En fait, toute traduction est une forme d’écriture sous contrainte. Voilà aussi pourquoi je disais qu’il n’y a guère de différence entre écrire et traduire, dès lors qu’on choisit d’écrire en observant des règles prédéfinies (poésie métrique ou rimée, respect d’un genre codifié, expériences oulipiennes, etc.). Et elles sont fortes, les contraintes auxquelles se soumet le traducteur, tant sur le fond que sur la forme ! Pourtant, bien souvent, les lecteurs n’imaginent pas combien la part de liberté est grande. On peut en prendre conscience en comparant deux adaptations d’une même œuvre par des traducteurs différents, lorsque c’est possible. Dans le petit espace de liberté disponible, chacun a projeté toute sa créativité, consciemment ou non, conformément à sa sensibilité, à ses besoins personnels, à sa propre relation d’empathie avec les nombreux esprits évoqués ici (2) – sans parler des partis pris éditoriaux, dont il a été question là (1), et qui peuvent donner délibérément une tout autre couleur au texte dans le cas de l’élaboration d’une nouvelle traduction.

Bref : grec, finnois, komi… tout ça, c’est des jeux de mots !

Antoine

S’il fallait résumer ma vie, je dirais que je suis un mélange entre Laure Adler, Droopy et Edouard Baer.

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