Découvrez Kiki DeGonzag, artiste transdisciplinaire ( écrivaine, danseuse, brodeuse…) à travers une série de textes dans lesquels elle nous fait plonger dans son univers.

Voici le quatrième volet.

dessin : Kiki DeGonzag 2020

Elle veut le dessiner nu. Elle veut ses mains, son sexe, la cambrure de ses reins, sa hanche, le pli de l’aisselle. Elle veut ses os, sa viande, son muscle saillant, la veine et le tendon. Elle veut le dessiner, le peindre, le graver dans le bois, le broder, l’habiller de soie, de tulle, de macramé. Elle veut qu’il danse, qu’il chante, elle veut la pulpe de ses doigts sur les touches d’un piano. Elle veut qu’il se tienne droit, elle veut tracer les contours de ses ombres, elle veut des lignes, nouer les fils de ses cheveux. Et veut fabriquer des pinceaux avec sa toison, tendre sa peau sur un châssis, humecter ses lèvres d’encre et d’aquarelle. Elle veut qu’il soit muse et qu’il soit maître. Qu’il reste immobile durant des heures, qu’il lui offre son profil, son nez, son front, sa pupille. Qu’il décide, qu’il lui dise de se taire, qu’il la prenne par la main et qu’il l’emmène à Istanbul, à Paris, à Jérusalem. Elle veut lui montrer les pierres taillées, les vitraux, les balcons fleuris, les œuvres monumentales. Qu’il observe, qu’il cherche à ne pas comprendre, qu’il s’intrigue, s’interroge sans poser de question. Qu’ils hurlent en duo, qu’ils osent ailleurs, autrement, qu’ils ne se quittent plus, qu’ils s’abîment au milieu de la foule, qu’ils oublient tout.

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